Oct / 04
La maison blanche fait pression sur la FED afin de la pousser à baisser ses taux d’intérêt, l’administration américaine souhaite de son côté faire baisser le dollar…. Tout indique que c’est une énorme bêtise.
« Ma seule question est de savoir qui est notre plus grand ennemi, Jay Powel (président de la FED) ou le président Xi… ? ».
Cette question a été lancée par Donald Trump sur tweeter durant le mois d’août dernier. Elle en dit long sur les pressions qu’exerce la maison blanche sur la FED afin de la pousser à baisser ses taux d’intérêt, et sur la volonté de l’administration américaine de faire baisser le dollar…. Mais est-ce raisonnable, voire même une bonne idée ?
Voir des gouvernements souhaiter faire baisser leur devise afin d’accroître leurs exportations n’est pas nouveau. C’est notamment la stratégie suivie par la Chine jusqu’en 2014. Par conséquent, voir Donald Trump s’emparer de cette logique dans le cadre de son « America First » n’est pas très étonnant. Il pourrait effectivement se servir de cet argument pour montrer sa volonté de dynamiser l’industrie américaine et ses exportations afin de créer plus d’emplois… C’est parfait pour son « America First»…! Mais avant d’applaudir à deux mains cette grande idée, il convient de comprendre qu’elle est en réalité une énorme bêtise… !
Si le dollar baisse, l’industrie américaine pourra effectivement développer ses exportations. Mais ce dollar plus faible aboutira au final à une baisse du PIB américain. En effet, dans nos économies contemporaines, encore largement positionnées dans une mondialisation ou globalisation des échanges, cette démarche aboutit à faire monter le prix des biens importés, ce qui entraîne une baisse de la consommation des ménages, et in fine, une baisse du PIB. Le bilan de cette démarche fait donc apparaître un gain modeste dû au développement des exportations, mais fait apparaître une perte importante sur la baisse du PIB national…, pas génial au final !
Mais le plus gros problème de cette stratégie repose sur l’évolution de nos économies en direction d’une régionalisation des chaînes de valeurs. En effet, la Chine n’est plus, et ne peut plus être, l’usine du monde. Les entreprises mondialisées ne peuvent plus asseoir leur production sur la Chine notamment, en raison de la progression des coûts de production chinois. Dit autrement, les salaires chinois ont augmenté et les coûts de production en Chine ne sont plus aussi compétitifs qu’auparavant. En parallèle de cet élément, nos nouvelles habitudes de consommation, passant par le canal du web, obligent les fabricants à plus de réactivité vis-à-vis des consommateurs, en termes de délais de traitement des commandes, mais également dans la prise en compte de l’évolution de leurs attentes de consommation. Par conséquent, un fabricant peut de moins en moins standardiser sa production sur un plan mondial et doit de plus en plus prendre en compte les spécificités régionales des attentes des consommateurs. Cet ensemble de paramètres pousse les industriels à rapprocher leurs usines au plus près de leurs consommateurs. Cet ainsi que nous passons d’un modèle de « globalisation », où la Chine est l’usine du monde, à un rapatriement des usines dans des régions proches du consommateur afin d’adapter la production en fonction de ses demandes.
Sur le plan monétaire, ce nouveau paysage industriel n’est plus positionné sur les exportations, mais plutôt sur les importations de matières premières, et par conséquent, dirigé sur une recherche d’optimisation des coûts à l’importation… Sur le plan de la devise, la bonne idée consiste donc à maintenir une monnaie forte afin de limiter les coûts à l’importation. Par conséquent, posséder une devise forte comme le dollar et souhaiter la faire baisser pose franchement question sur le bien-fondé de cette démarche….
Un autre problème apparaît concernant la volonté affichée par Washington de faire baisser le dollar, notamment en agissant sur les taux d’intérêt. Si la FED se mettait à baisser « furieusement » ses taux, comme le souhaite Donald Trump, les autres banques centrales seraient incitées à en faire de même ce qui provoquerait pour le coup une véritable guerre des monnaies. On aboutirait à une surenchère de baisse de taux, qui serait extrêmement destructrice pour nos économies
Hé bien, l’une des réponses les plus plausibles consiste à considérer l’axe politique…, et plus précisément l’axe électoral. Donald Trump est en campagne et veut avant tout et « envers et contre tout » être réélu. Il doit par conséquent porter un message audible et compréhensible par son électorat… Après tout, « Paris vaut bien une messe… ». Alors, pour atteindre sa réélection à la Maison Blanche …une « bêtise » économique de plus ou de moins…, l’Amérique et le commerce mondial pourront bien s’en remettre… ! À suivre.
© photos : Sergio Souza
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